L’objectif du cours est d’explorer l'inscription de la présence des immigrés en provenance de territoires de langue allemande situés dans l’Europe médiane dans le tissu urbain des grandes villes américaines autour de 1900. Le tournant du siècle correspond au moment où ils constituent la communauté étrangère la plus importante aux États-Unis selon les chiffres du US Census Bureau de 1910. Caractérisée par une très forte hétérogénéité sociale, politique et religieuse, les communautés germanophones présentent une organisation spatiale complexe, à la fois dispersée sur le territoire américain et regroupées dans des espaces urbains relativement homogènes, les « enclaves ». La plus connue d’entre elles, « Kleindeutschland » (« Little Germany ») aujourd’hui disparue, était un ensemble constitué de 400 Blocks (= blocs d’habitations) à très forte densité de population, situé au sud-est de Manhattan, dans le Lower East Side. Au début du XXe siècle, quelque 310 000 personnes y vivaient dans des conditions souvent précaires (« Tenements »). Elles fréquentaient les nombreux lieux de sociabilité comme les salles de bal et de concerts, théâtres, restaurants, cafés et brasseries, lisaient la presse quotidienne en langue allemande et se rassemblaient dans des Vereine (associations de clubs de tir, chorales, cercles religieux, etc.).

Ces expériences migratoires se donnent à voir dans des narrations très diverses qui les reconstruisent et les reconfigurent tout en mettant souvent en scène la rupture avec la « Heimat » et l’entre-deux du processus d’assimilation illustré par le « hyphen » : ou « Bindestrich » : German-American. Des extraits d’articles de presse, de journaux intimes, de correspondances, de romans, de films, nous permettront de mieux comprendre comment les immigrés ont cherché à constituer un « ciment » communautaire composé d’habitudes, de conventions et de normes qui a facilité et accéléré leur intégration dans le « Nouveau Monde ».